11 May
11May

« Mon cœur a ses raisons que ma raison ignore » 

Blaise Pascal

          Le 8 mai 2025, le pape Léon XIV fut appelé à la tête de l’Eglise pour succéder au pape François. Premier pape issu de l’ordre de Saint-Augustin, créé au XIIIe siècle et se voulant respectueux de la règle de Saint-Augustin mettant en avant le devoir de pauvreté et faisant une place centrale à la prière et au mysticisme de l’Amour chrétien. Né au IVe siècle, Augustin fut évêque d’Hippone en Algérie. A partir d’une étude approfondie de la philosophie grecque et romaine, il fonde la philosophie de la religion. Sa méthode de réflexion sur soi, qui découvre en nous « une Présence plus profonde que nous-mêmes », a marqué la religion chrétienne et la philosophie occidentale jusqu’à l’existentialisme chrétien des jansénistes du XVIIe, dont le plus connu d’entre eux fut Blaise Pascal. 


Dieu 

          A la fois transcendant et au plus profond de notre intimité, le Dieu de saint Augustin est Celui sans qui toute Vérité est impossible. Profondément faible et limité, l’être humain est incapable d’accéder à l’éternité sans l’aide de Dieu qui, Lui, est éternel, nécessaire et immuable. Dès que nous pensons, que nous atteignons une vérité, que nous saisissons la nécessité du vrai, c’est que nous nous référons à quelque chose qui nous dépasse. Ce quelque chose qui nous dépasse et sur lequel se fonde le vrai, Augustin le nomme Dieu. 

Dieu est l’être même, la réalité dans sa totalité, l’essentia selon la terminologie d’Augustin. L’« essence » est ce qui persiste malgré le changement, ce qui fait que nous sommes toujours la « même » personne malgré le temps qui s’écoule, le fait que nous vieillissons, que notre vision du monde et de la vie évolue. L’essence c’est ce qui est vraiment, ce qui ne change pas, ce qui est immuable. Dire de Dieu qu’Il est « Celui qui est » c’est dire qu’Il est « Celui qui est immuable ». Le Dieu de saint Augustin est très proche de l’Etre de Platon sans pour autant s’y réduire. 


L’Homme 

          La nature de l’être humain s’épanouit dans son âme qui est comme le Père : elle possède l’intelligence d’elle-même, la réflexion, c’est-à-dire la capacité de se penser elle-même de dire : « Je suis ». Saint Augustin nous dit que l’âme est une pensée d’où jaillit une connaissance, et c’est de cette connaissance que nait l’amour que l’âme peut se porter à elle-même. Très platonicien, Augustin définie l’être humain comme une âme qui se sert d’un corps qu’elle rend vivant part sa présence. 

Cependant, le péché originel eut pour effet de renverser le rapport de force entre l’âme et le corps. Créée pour gouverner le corps, l’âme est devenue son esclave. Alors qu’elle était tournée vers la contemplation de Dieu, elle est désormais attachée et entachée par la matière. Contrairement à Platon qui considérait dans le Phédon que le corps est un tombeau pour l’âme, pour Augustin c’est le fait pour l’âme d’avoir oublié sa nature divine qui l’a faite prisonnière du corps. 


La Grâce 

          Pour sortir de cette déchéance, l’âme a besoin de l’aide de Dieu et de la grâce divine. Cette grâce, ou foi, est participation au divin, seul véritable « miracle », car purement intérieur. Ce miracle intérieur est le miracle de la conversion du cœur qui dépasse par sa nature même les miracle « extérieurs » qui peuvent seulement frapper l’imagination, alors que la grâce rend l’âme entièrement tournée vers Dieu. Sans la grâce il nous est possible de connaitre la loi divine, mais nous avons besoin de la grâce pour pouvoir l’accomplir. 

Saint Augustin nous dit également que la foi précède les œuvres, c’est-à-dire qu’une bonne action n’a pas de valeur si elle n’est pas faite en résonnance avec Dieu, avec la foi enchainée au cœur. Sans la grâce, point de salut, et c’est précisément là que la pensée de saint Augustin devient un Mystère : les élus, ceux ayant reçus la grâce divine, sont unis par leur amour commun de Dieu. Ils forment un peuple universelle avec tous les chrétiens des temps passés, présents et à venir en Dieu. 

Ce monde en Dieu est celui de la « Cité de Dieu », dont la construction se poursuit depuis les débuts de la Création. Le Mystère tient en ce que chacun est, selon saint Augustin, « prédestiné » à rejoindre ou non cette Cité dont le peuple sera sauvé lors du Jugement Dernier, alors que les autres seront condamnés pour l’éternité à résider en enfer auprès du diable. Au nom de quoi se fait cette prédestination ? notre raison l’ignore, car c’est un secret divin. Nous devons simplement l’accepter avec joie, car Dieu est profondément juste, équitable et d’une bonté infinie.

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