« Toute personne est suffisamment éloquente pour parler de ce qu'elle sait »
Socrate
Socrate est le fondateur de cette tradition philosophique d’après laquelle l’esprit ne tire pas la connaissance des choses sensibles et extérieures, mais contient en lui-même le principe de la connaissance vraie. Largement développé par son disciple Platon, puis par Descartes, Leibniz et Kant, cette doctrine est à la racine du développement de la philosophie Antique et moderne.
La science est innée
La science est ce qui permet à l’être humain de comprendre l’âme intelligente qui règne sur l’univers, et dont l’origine est contenue dans l’âme humaine. La science appartient donc à l’âme de façon innée et peut se déployer dans toute son étendue dès lors que les individus se comporte de manière conforme à leur vraie nature, c’est-à-dire en harmonie avec l’univers.
Toute la pratique philosophique de Socrate a été de produire le réveil de ses interlocuteur pour les amener à comprendre cette nature qui sommeil au fond d’eux, dans leur âme. Socrate, fils d’une sage-femme, se disait « accoucheur des âmes » et pratiquait la maïeutique : l’art d’accoucher. Concrètement, sa méthode était la discussion et le dialogue. Il n’a jamais voulu faire œuvre de professeur public qui, à la manière des sophistes, se faisaient rétribuer pour leurs enseignements.
Par des questions habillements posées — ce qui montre que contrairement à ce qu’il affirmait il savait très bien où il emmenait ses interlocuteurs — il tirait de l’âme elle-même la vérité qui sommeille en elle, et poussait ceux qui se risquait à dialoguer avec lui à abandonner leurs idées reçues. La célèbre ironie socratique est passée à la postérité et définie en grande partie l’attitude du philosophe qui se doit de se moquer des opinions préconçues : celles des autres, mais aussi et surtout les siennes. Allant de pair avec l’ironie, Socrate considérait comme central la place de l’Amour, celui qui s’adresse à l’âme plutôt qu’aux corps, car la beauté de l’âme est infinie alors que celle du corps flétrie et s’en va en un battement de cil du Temps.
La science vise l’universelle
Socrate se faisait le chercheur de l’essence des choses, c’est-à-dire de ce qui fait que les choses sont ce qu’elles sont et permets de les regrouper en catégories. Par exemple : ce qui fait qu’un vase est un vase, un arbre un arbre, &c. Ce qui peut sembler inutile au premier abord, mais qui sera reprit par Aristote et est aujourd’hui aux fondements de la science contemporaine. Aristote commentait d’ailleurs que Socrate observait les choses sensibles avec une grande rigueur afin d’en comprendre les spécificité et, par une juste définition de leurs caractéristiques, s’élevait à leur essence.
Socrate était sans cesse en quête de définition, et c’est également là que réside l’un de fondements de la philosophie : définir ce que sont les choses physiques, mais aussi et surtout ce que sont les choses morales, les choses de l’esprit, c’est-à-dire les choses de l’âme. C’est dans les premiers dialogues de Platon qu’est exposé cette recherche frénétique de définition : le courage dans le Lachès, la vertu dans le Ménon, la sagesse dans le Charmide, l’amitié dans le Lysis. Socrate partait des choses considérait comme vraies par tout le monde puis, en posant une série de questions très simples, montrait que ces considérations étaient fausses et concluait par une histoire, un mythe, permettant d’exposer sa vision des choses de façon analogique et poétique.
Aristote nous dit aussi que Socrate n’avait pas radicalement séparé l’essence des choses sensibles, et que cette séparation provient de Platon qui l’a appelée l’Idée. Cette théorie de l’Idée appartient donc à Platon, mais a été provoquée par la pensée de Socrate. Il n’est donc pas faux de considérer, comme Nietzsche, que la notion de science développée par Socrate contient en germe tout le développement ultérieur de l’idéalisme philosophique.
La science est vertu
Etonné par l’aveuglement des êtres humains qui sont davantage préoccupés par milles choses secondaires comme l’argent, la réputation ou encore la gloire plutôt que par l’embellissement de leur âme, la vérité et la sagesse, Socrate s’est décidé à se préoccuper de ce qui compte véritablement : nous connaitre nous-mêmes.
Nous admettons volontiers qu’il est nécessaire de pratiquer une forme de science pour toute discipline : que ce soit pour être pilote, médecin ou encore coiffeur, il est nécessaire de posséder une forme de savoir. Mais nous n’admettons pas pour autant de façon aussi évidente qu’il soit aussi nécessaire de posséder une science pour ce qui est le plus important et le plus difficile : vivre correctement sa vie !
Ainsi, comme les sophistes, Socrate pense que l’être humain est l’objet par excellence de la connaissance, pas la nature. Mais il se distingue d’eux en ce qu’il ne croit pas que les choses humaines puissent faire l’objet d’une science purement empirique. Il pensait plutôt que les choses humaines doivent faire l’objet d’une science rigoureuse qui serait valable pour tous les hommes, en tout lieu et en tout temps. Il reproche également aux poètes et aux devins de dire beaucoup de belle choses, mais de n’avoir aucune véritable science de ce qu’ils disent. De là vient en grande partie sa condamnation à mort : Socrate s’est élevé contre les lois morales de sa cité héritées des poètes et des devins pour exhorter ses concitoyens à remplacer les anciennes croyances par la science du bien.
Dans le Ménon de Platon, Socrate expose ce qu’est selon lui la vertu : nous disons que la santé, la beauté et la richesse sont utiles, mais nous disons aussi qu’elles sont nuisibles si mal utilisées. Or nous les utilisons bien lorsque nous avons connaissance de ce qu’est le bien. De même pour le courage, la justice ou l’amour : nous en usons bien lorsqu’elles sont accompagnées d’intelligence. C’est donc la connaissance du bien, l’intelligence et la sagesse qui détermine ce qui est utile. Ce sont donc ces qualités que nous devons chercher à développer en priorité. Se laisser dominer par les plaisir du corps est une servitude qui nous retire la capacité de bien faire et fait de nous un esclave préférant le nuisible à l’utile.